Qui est Duran Lantink, le créateur surréaliste nommé directeur créatif de Jean Paul Gaultier ?

“Je retrouve en lui l’énergie, l’audace et l’envie de s’amuser à travers le vêtement, que j’avais moi-même à mes débuts : le nouvel enfant terrible de la mode”, a confié Jean-Paul Gaultier dans un communiqué dévoilé il y a quelques semaines. Après avoir fait ses adieux lors d’un spectacle célébrant ses cinquante ans de carrière au Théâtre du Châtelet en 2020, le couturier a choisi de donner carte blanche chaque année à différents designers afin de réinterpréter les codes iconiques de sa maison à travers une collection haute couture. Chitose Abe, Glenn Martens, Olivier Rousteing, Ludovic de Saint Sernin… Plusieurs noms se sont adonnés à l’exercice, d’année en année, sans qu’il n’y ai de directeur artistique permanent annoncé. Jusqu’au jour où un dignement nommé “nouvel enfant terrible de la mode” s’est dévoilé au grand public : Duran Lantink, désormais à la tête des collections de prêt-à-porter et de couture de la maison parisienne fondée en 1976.

En mars dernier, le créateur est devenu viral sur les réseaux sociaux grâce aux looks d’ouverture et de clôture de son défilé automne-hiver 2025-2026. Une femme portant un torse d’homme et un homme arborant une imposante paire de seins en silicone, il n’en fallait pas plus pour attirer l’œil du public. Avec ces silhouettes, Duran Lantink défie les limites du corps, caricature les genres et joue également avec le mauvais goût. Une vision de la mode effrontée qui avait déjà provoqué le même effet en 2018 lorsque la chanteuse Janelle Monáe s’est vêtue d’un pantalon en forme de vagin signé Lantink dans l’un de ses clips. Formé au sein des écoles d’art et de design Gerrit Rietveld Academie et Sandberg Instituut à Amsterdam, le Néerlandais possède une approche conceptuelle et théorique de la mode. Avec sa propre marque fondée en 2016, il propose des pièces non genrées, réalisées à partir de tissus upcyclés, qui remettent en question la structure traditionnelle du vêtement.

Après une pause causée par la pandémie de Covid-19, le designer s’est fait un nom pendant la fashion week de Paris en mars 2023 en posant les bases d’une mode anticonformiste, expérimentale et surréaliste. Très vite, les distinctions affluent : il remporte le prix spécial de l’ANDAM en 2023, le prix Karl Lagerfeld lors de la cérémonie du prix LVMH en 2024, puis devient lauréat du prestigieux International Woolmark Prize en 2025. Comme Jean-Paul Gaultier, Duran Lantink aime défier les normes, effacer les frontières du genre et jouer avec les corps. Rembourrages exagérés, hanches et poitrines démesurées, imprimés débridés, coupes hasardeuses… Le designer s’amuse en proposant des silhouettes à la fois impactantes et décalées, toujours réalisées de façon durable à partir de tissus recyclés. Pour Duran Lantink, chaque pièce, bien plus qu’un simple vêtement, vient questionner notre vision de nous-même et plus largement de la société, à la manière du Pop Art dans les années 1960.

Toujours plus singulières, ses créations s’illustrent à une époque où l’industrie joue de plus en plus la carte de la sécurité. Comme l’a longtemps fait son prédécesseur, le nouveau directeur créatif de Jean Paul Gaultier célèbre le bizarre, le marginal et l’imperfection à travers la mode. Une vision partagée qu’il défendra au mois de septembre prochain avec sa première collection pour la maison lors de la fashion week printemps-été 2026.