INTERVIEW

Romain Teboul, co-fondateur de Gertrude : "En élargissant les représentations, la mode ouvre des possibles."

Publié le

14 novembre 2025

Dans sa dernière campagne “The Tribe Core”, la marque marseillaise Gertrude met en lumière l'actrice Mayane-Sarah El Baze et Ilian, jeune mannequin porteur de trisomie 21. Un choix fort, assumé sans surjeu, qui incarne une vision inclusive du streetwear. Ici, pas de manifeste, mais une image fidèle à la réalité plurielle de la ville. Entretien avec le co-fondateur du label, Romain Teboul.

©Gertrude

Votre dernière campagne met en lumière un jeune homme porteur de trisomie 21. Qu’est-ce qui vous a poussé à faire ce choix fort et symbolique ?

Ce choix s’est imposé avec une évidence tranquille. Il ne s’agissait pas de revendiquer, mais de refléter la diversité authentique de notre clientèle, de la ville, de la vie. Notre collection “The Tribe Core” incarne une tribu idéale, faite de personnalités singulières qui coexistent, se nourrissent mutuellement et dialoguent. Ce casting ne relève pas du manifeste : il est le miroir du réel.

Comment cette démarche s’inscrit-elle dans les valeurs profondes de Gertrude ? Est-ce une direction que vous souhaitez poursuivre ?

Gertrude est née dans la rue, au plus près des gens. L’inclusivité, chez nous, n’est jamais surjouée : elle s’inscrit dans notre culture visuelle, dans notre manière de montrer celles et ceux qui portent nos pièces. Nous poursuivons cette voie, non comme une obligation à cocher, mais comme une pratique exigeante et ouverte, renouvelée à chaque campagne.

"La mode façonne les imaginaires collectifs. En élargissant les représentations, elle ouvre des possibles."

La mode inclusive est encore trop rare dans le streetwear. Les marques ont-elles une responsabilité sociale ?

Absolument. La mode façonne les imaginaires collectifs. En élargissant les représentations, elle ouvre des possibles. Notre responsabilité est de le faire avec justesse, sans fétichisation, en garantissant à chacun la même exigence d’image et de narration.

©Gertrude

Gertrude est née à Marseille. Comment décririez-vous l’ADN de la marque aujourd’hui ?

Marseille nous a transmis le goût du mélange, de la vitalité et d’un certain sens de l’élégance fonctionnelle. Notre ADN repose sur des coupes nettes, des matières pensées pour la ville, et une approche utilitaire qui ne sacrifie jamais l’allure.

Fonctionnalité, design, expression artistique : comment équilibrez-vous ces trois dimensions ?

Tout part de l’usage. Nous sculptons la coupe autour de la fonction, puis nous signons l’allure. C’est un équilibre subtil entre rigueur et expression.

©Gertrude

Quels sont les moments clés depuis la création ? Des tournants décisifs ?

L’ouverture aux collaborations artistiques a enrichi notre vocabulaire visuel. Et l’élargissement du casting — avec Ilian, Mayane, ou Madeleine, centenaire mise en lumière dans une précédente campagne — a redéfini notre rapport au temps et à l’image.

"Nous privilégions la cohérence : des vêtements qui servent, des campagnes qui ressemblent aux gens, et des choix de casting qui ont du sens avant d’avoir de l’écho."

Une nouvelle boutique à Annecy : pourquoi ce choix et que représente-t-elle ?

Annecy est une ville magnifique, au climat exigeant, où l’outerwear est roi. Nous y avons trouvé une communauté déjà très réceptive à notre univers. Sa proximité avec la Suisse en fait aussi un point de rencontre stratégique pour notre clientèle frontalière. Comme toujours, des activations et événements viendront rythmer l’ouverture.

©Gertrude

De prochains territoires visés ?

Deux nouvelles adresses sont prévues pour 2026 : Toulouse et Bordeaux, au cœur de leurs centres historiques. Les travaux débuteront en début d’année. D’autres projets sont en cours, portés par la même ambition.

Votre collaboration la plus marquante ?

Elles ont toutes leur singularité, mais si je devais en retenir une, ce serait Jul. Parce que Jul, tout simplement.

©Gertrude

Que souhaitez-vous que Gertrude incarne ?

Une référence du streetwear français : utile, désirable, inclusif. Une marque sincère, qui crée des pièces que l’on garde, et des images qui rassemblent sans uniformiser.

Dans un univers où tout est image, qu’esquivez-vous encore chez Gertrude ?

Le cynisme et le bruit pour le bruit. Nous privilégions la cohérence : des vêtements qui servent, des campagnes qui ressemblent aux gens, et des choix de casting qui ont du sens avant d’avoir de l’écho.

©Gertrude
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