INTERVIEW

Pourquoi l’Eurodance n’a pas dit son dernier mot ? Entretien avec Die Klar, co-fondateur de La Darude.

Publié le

14 janvier 2022

Alors que la France exerce depuis peu la présidence tournante du Conseil de l'Union européenne pour une durée de six mois, une vague eurodance déferle sur les nuits parisiennes — et pas que — grâce à La Darude, dernier projet à succès du collectif Bel Air, basé sur le second degré et le délire. Souvent moquée, cantonnée au karaoké où l'on reprend à gorge déployée le chef-d'œuvre de 2004 des Moldaves d’O-zone, Dragostea din tei, l'Eurodance n'a jamais autant embrasé les dancefloors. En plein revival de la mode Y2K, ces soirées se déroulent dans une ambiance kitsch où les souvenirs d’enfance côtoient l’euphorie des raves parties du début des années 2000. Si le temps n’est plus tellement à la fête, Die Klar, co-fondateur de La Darude qui soulève à chaque mix une foule de lofteurs en délire, réchauffe les cœurs et transmet à S-quive les valeurs fédératrices de l'eurodance, son ode au fun de la belle Europe.

soirée La Darude
Armée de lofteuses © Kyle

Karl, je crois que tu as toujours eu un petit faible pour la politique française. Qu’attends-tu de Clément Beaune, chef d'orchestre de l’agenda européen d’Emmanuel Macron pour cette année européenne ?

Well, Clément Beaune est un peu le Charlie de Lulu des questions européennes d’Emmanuel Macron. Il aura pour principale mission de nous faire remporter la plus cool et déjantée des compétitions européennes, l’Eurovision ! 30 ans sans victoire, ça fait un peu long quand même, donc s’il vous plaît monsieur Beaune, faites le nécessaire pour ramener la coupe à la maison !

“Freed From Desire fait encore aujourd’hui l’unanimité partout chez les Européens car elle est en ce sens un hymne à la l’amour, la solidarité et à la liberté !”

Pour Aurélien Bellanger, être européen, c’est pouvoir reprendre, après 20 ans et comme un hymne : “i’m Blue Da ba dee da ba daa, da ba deeda ba daa”. Et pour toi, ça consiste en quoi ?

(Rires) Un sacré lofteur cet Aurélien Bellanger ! Personnellement j’aurais plutôt dit, être européen c’est pouvoir chanter 20 ans après et comme hymne Freed From Desire. Alors certes j’adore le bleu, les zinzins d’Eiffel 64 et je comprends tout à fait l’esprit de sa réponse mais à vrai dire le tube de Gala est encore plus fédérateur.

Freed From Desire fait encore aujourd’hui l’unanimité partout chez les Européens car elle est en ce sens un hymne à la l’amour, la solidarité et à la liberté ! Quelque soit l'âge que tu as, ta condition sociale et surtout tes goûts musicaux, ce “Na na na na na” te fera bouger jusqu’au bout de la nuit. Tiens cela ne nous rappelle pas l’esprit de l’Ode à joie de l’Union européenne ?

Quels sont tes 3 tubes préférés ?

S’il ne fallait choisir que 3 tubes cela serait :
A l’heure du goûter : la chaleureuse  Alice Deejay - Back In My Life 
A l’heure de l’apéro : la sulfureuse Starstylers - Keep On Moving
A l’heure de teufer : la raveuse Dune - I Can’t Stop Raving 

Karl Die La Darude
Die Klar perché sur ses buffalos © Wendy Keriven

Italodance, makina, dream trance, uplifting, acid, hard trance, happy hardcore et hardstyle… l’Eurodance rassemble tellement de sous-genres. En quoi La Darude reflète l’esprit Eurodance ?

(Hum) En réalité je distingue 3 écoles sur les genres que tu as mentionné : celle de l'Eurodance avec l’italodance, puis l’école trance avec la hardtrance, l’uplifting, la dream trance et pour finir l’école hardcore avec la makina, la hardstyle.  

Ce sont des genres musicaux qui cohabitent parfaitement au sein de La Darude Party car elles incarnent des valeurs de fun et de fête. Nous sommes portés par cette volonté de faire la fête dans un esprit de liberté, d’amour et de tolérance. A l’image des clips musicaux euro d’époque et du revival de la mode Y2K que nous traversons actuellement, nos soirées se déroulent dans une ambiance kitsch et bon enfant où nos souvenirs d’enfance côtoient l’euphorie des raves parties du début des années 2000.

“Icône, Loana l’est et le restera pour nous, car elle est le symbole de la résilience et d’une époque insouciante, libre et déjantée. ”

La nostalgie fait vendre, d’ailleurs vous avez érigé Loana en icône. En quoi la télé-réalité des années 2000 est-elle différente de celle d’aujourd’hui ?

La télé-réalité est pour beaucoup le reflet de notre société qui a évolué au fil du temps avec l’apparition d’internet et des réseaux sociaux. 

En 2000, ces nouveaux programmes télé étaient de véritables phénomènes de société. Des émissions comme Loft Story, Star Academy ou Koh Lanta étaient regardés en prime-time, sur des chaînes hertziennes, par des millions de téléspectateurs. Car pour la première fois, on pouvait suivre à la télévision, la vie quotidienne de personnes anonymes au sein d’une communauté. 

J’aimais beaucoup à l’époque la sincérité et le naturel des candidats qui s'affichent tel qu'ils étaient au quotidien. Pour la plupart, il s’agissait d’une aventure unique, une parenthèse fun de leur vie. Je m’identifiais beaucoup à l’humour de Jean Pascal, à la folie de Steevy et à la générosité de Teheiura. Malgré la nostalgie de cette époque, les télé-réalités des années 2000 furent confrontées à de nombreuses dérives. En passant par la diffusion de comportements violents, de scènes olé olé, aux contrats abusifs et du peu de suivi psychologique à fin des aventures (Loana étant le symbole), la télé-réalité est aujourd’hui, plus encadrée, professionnalisée et scénarisée.

Cette dernière s’est beaucoup starifiée autour de l'émergence de personnalités publiques, naviguant d’émission en émission, comme un roman social sans fin. Le but étant pour la majorité des candidats devenus influenceurs comme Maeva Ghennam ou Paga de gagner de la popularité et pouvoir vendre leur image sur les réseaux sociaux.

Icône, Loana l’est et le restera pour nous, car elle est le symbole de la résilience et d’une époque insouciante, libre et déjantée. Notre Britney Spears à la française que nous chérissons tous et toutes à La Darude Party.

Kwanme La Darude Party
dj kwamē, co-fondateur de La Darude © Oriane Robaldo

Outre le gel fixation béton et les lunettes hyper vitesse, on retrouve la coupe mulet dans vos soirées : mode éphémère ou tendance durable ?

Ça s’en va et ça revient, comme dirait une certaine Coco Chanel “La mode se démode, le style jamais”. 

Ceci dit à La Darude Party, les codes vestimentaires liés aux années 2000 font partie intégrante de notre identité. Les lofteurs, le surnom de notre communauté de fêtards, associent de façon amusante des vêtements inspirés de leur enfance à des éléments beaucoup plus contemporains.

Porter des lunettes de vitesse, se décolorer les cheveux ou chiner des buffalos dans des boutiques de seconde main est le moyen de s’affirmer en tant que lofteur. Plus c’est kitch et tendance, plus on adore ça ! Cela tombe bien le style Y2K vit une seconde jeunesse et cela nous réjouit tout particulièrement ! 

La dérision sauvera-t-elle le monde ?

L'amour aussi !

La Darude Party
© Oriane Robaldo
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