ARTS
Publié le
29 janvier 2024
Le célèbre psychanalyste Jacques Lacan s’est éteint il y a 40 ans, mais sa relation privilégiée avec l’art reste intacte. Éternellement remarquable. Jusqu’au 24 mai prochain, le centre Pompidou de Metz convoque ses concepts intellectuels et les œuvres artistiques dans l’exposition "Lacan, quand l’art rencontre la psychanalyse". L’occasion inédite de se saisir autrement de son travail, aussi contesté qu’adoubé. S-quive s’est rendu dans le nord-est, pour cette exposition captivante et visionnaire.
La modernité propre au musée le plus visité de province surprend. Lieu incontournable des amateurs d’art contemporain, le centre Pompidou de Metz est d’ores et déjà, architecturalement parlant, une prouesse. Les premiers pas laissent entrevoir l’intérieur de la bâtisse, d’une hauteur faramineuse, gigantesque repère artistique. Prometteur... Il faut emprunter l’ascenseur aux vitraux transparents, élévation de 30 mètres. Jacques Lacan en France, est présenté galerie 2, première porte, en face de l’ascenseur...
La genèse de sa pensé se trouve dans l’art. En 1965 Lacan écrit : "L’artiste toujours précède le psychanalyste et lui fraie la voie". Dès la première salle, obscure, les spectateurs sont captivés par les mots du penseur. La retranscription de son unique interview télévisée en 1974, est escortée par les premières œuvres d’art. L’exposition donne le ton. Présentation de cet homme qui a fréquenté des penseurs français tels que Michel Foucault et Roland Barthes, mais qui, à l’instar de ces figures intellectuelles, n’avait jamais bénéficié d’une représentation muséale. C’est chose faite. Tout au long du parcours, 300 créations d’une justesse étonnante, racontent Lacan. L’art comme illustration. Les tableaux de "maître", comme outil de compréhension. Le point d’orgue de l’exposition reste ce que, en 1955 et pour 1 500 000 francs, le psychanalyste achète. C’est L’origine du monde, de Gustave Courbet, peinture à l’huile prêtée par le musée d’Orsay, qui fréquente de salle en salle, les créations d’André Masson, Dalí et Magritte. "On constate son inspirante relation entre l’art et son travail", souligne Émeline, professeure de lettres venue spécialement de Paris pour l’exposition. "L’alliance des tableaux du XXe siècle, aux œuvres modernes, est judicieuse". Les théories Lacaniennes du passé, sont cultivées, reprisent, critiquées et expliquées par l’art. Choix visionnaire et incontestablement. Judicieux.
Paz Corona, associé aux commissaires de l’exposition, confie à l’Orient-Le Jour que l’art sert à Lacan "à faire voir ses concepts". Des concepts indéniablement ancrés dans l’actualité. L’amour, le genre, la place de la femme, les croyances… Ces sujets font office de fil conducteur, en complicité avec les œuvres. Dans ce parcours novateur, une salle attire l’attention de la professeure, la section sur la remise en question du genre par Lacan. "C’est une particularité qu’il faut souligner, imaginez à cette époque que sont les années 1970-1980, personne n’osait bousculer les fondements sur cette question", affirme-t-elle. Le psychanalyste l’a fait, reflet d’une exposition main dans la main avec son temps, qui permet de convoquer la modernité avec des concepts passés. Le centre Pompidou démontre magnifiquement que Lacan, a encore des choses à vous dire.
"Lacan, quand l’art rencontre la psychanalyse" au centre Pompidou de Metz jusqu’au 24 mai prochain.
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